Avec 73 sites injectant du biométhane dans le réseau exploité par GRDF recensés à la mi-mars, la dynamique du gaz vert semble se confirmer pour le gazier. En parallèle, l’entreprise, qui compte 11 millions de clients, compte en conquérir 30 000 de plus en 2019, et mise pour cela sur le changement de gaz dans les Hauts-de-France et par le potentiel de bascule des clients fioul.
« L’avenir de notre entreprise repose bien sur le verdissement », pose Edouard Sauvage, directeur général de GRDF. Rien de vraiment nouveau sous le soleil, sinon la confirmation du virage pris par le gazier vers toujours plus de vert. « Ce verdissement, c’est la conviction qu’il y a une attente sociétale très forte sur la décarbonation, et surtout la conviction que GRDF peut avoir toute sa place dans ce schéma allant vers la neutralité carbone. » Pour le dirigeant, la priorité numéro 1 est la maîtrise des consommations d’énergie : la sobriété et l’efficience énergétiques doivent être à la base de toute réflexion en matière de transition écologique et solidaire. « Le gaz renouvelable est très complémentaire des autres EnR et présente un atout supplémentaire : son stockage inter-saisonnier. En France, les besoins étant quatre fois plus élevés en hiver qu’en été, seule une solution permettant ce stockage est pertinente économiquement et écologiquement dans la durée. » A la mi-mars 2019, 85 sites d’injection sont recensés, dont 73 qui injectent du biométhane dans le réseau exploité par GRDF. Depuis début 2017, la capacité d’injection a quasiment doublé pour atteindre 1 320 GWh/an ; 661 projets sont bien avancés, représentant 14 TWh de capacité maximale d’injection par an. « L’éolien et le solaire ont mis 11 ans pour atteindre 1 TWh, le gaz renouvelable a mis 7 ans », souligne Edouard Sauvage.
Un réseau connecté
Première étape vers les « smart gas grids », les compteurs communicants. A la mi-mars, 3 millions sont posés et l’objectif est d’atteindre les 5 millions d’ici la fin de l’année et les 11 millions en 2023. Le développement de capteurs mène à plus de 200 000 puces RFID posées sur le réseau et un millier de postes sont communicants, la totalité des postes d’injection de biométhane ayant aussi des possibilités de télé-exploitation. « On va aller de plus en plus vers une capacité de conduire notre réseau pour permettre des rebours du réseau de distribution vers le réseau de transports et, demain, l’intégration de gaz renouvelable produit soit sous forme d’hydrogène soit sous forme de méthane à partir d’EnR électriques. Des projets sont en cours pour jouer sur la complémentarité des réseaux gaz et électrique avec la mise en place de micro-cogénération. » Assénant que la solution tout électrique pour le chauffage représente beaucoup de défauts, Edouard Sauvage a précisé que cela n’excluait pas de développer des systèmes de pompes à chaleur afin de « profiter d’une solution thermique renouvelable autre puisqu’on se rend compte que l’hybridation est toujours la meilleure solution ».
De nouveaux fabricants de solutions thermodynamiques gaz et absorption ?
« L’électricité est une énergie décarbonée mais non stockable qui n’est pas capable de faire face aux pics de consommations en hiver, a renchéri Alain Mille, directeur du Développement de GRDF. Une façon de jouer sur le fait d’utiliser de l’électricité en période de faibles besoins et de passer au gaz pour les besoins en hiver est en effet de mettre en place des solutions hybrides : soit dans un même équipement soit dans deux équipements accolés, une chaudière gaz et une Pac électrique. Cela présente l’inconvénient d’être un peu plus cher mais, en termes d’optimisation du système, c’est la meilleure solution. » Il a également évoqué les systèmes thermodynamiques gaz, plus performants que des chaudières classiques - « On parle beaucoup de Boostheat mais d’autres fabricants arrivent avec ce type de systèmes qui permettent d’obtenir des rendements à 100 % » - ainsi que l’arrivée prochaine de Pac gaz à absorption, dans la lignée de Robur, chez d’autres constructeurs, dont il n’a pas révélé les noms. « Ces Pac permettent d’atteindre des rendements entre 140 et 160 sur PCI, ce qui fait tout de même gagner 50 % de consommation. »
Premier basculement en Hauts-de-France le 9 avril
Autre projet majeur en cours : l’opération de changement de gaz dans les Hauts-de-France, rendu nécessaire par la fin de l’exploitation du gisement de gaz de Groningue aux Pays-Bas, qui représente 10 % de la consommation française et alimente 1,3 million de clients. GRDF est tenu de se rendre chez tous ces clients pour vérifier leur installation, s’assurer de leur compatibilité ou, le cas échéant, faire procéder à des réglages voire au remplacement des appareils. Le basculement vers le gaz H de la première zone pilote aura lieu le 9 avril. « Le nombre d’appareils non compatibles est de 3 %, indique Edouard Sauvage. Ce projet s’inscrit en outre dans une trajectoire de solde client qui avait profondément changé depuis quelques années puisque nous étions dans une phase d’ouverture des marchés et d’érosion de la clientèle. » GRDF a revu ses ambitions à la hausse et table, pour les trois prochaines années, sur 30 000 client supplémentaires gagnés. « Nous sommes confiants : nous y arriverons d’une part par le développement du gaz naturel dans les logements neufs et, d’autre part, par la bascule des clients fioul vers le gaz. » 4,1 millions de logement sont concernés et un million situés à proximité du réseau pourraient basculer.
En 2018, GRDF affiche un chiffre d’affaires de 3 477 M€ (en légère baisse de 2,3 % par rapport à 2017) et un résultat net de 143 M€. « Cette évolution est principalement due à un facteur climatique », a précisé Édouard Sauvage. L’année 2018 a été une année chaude, ce qui s’est traduit par une baisse des volumes de gaz acheminés à 279,5 TWh. Corrigées du climat, ils restent stables à 287,6 TWh.
