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Accusé d’incivisme dans la crise, le bâtiment révolté

19 MARS 2020 - CFP

Jacques Chanut, président de la FFB, fait la tournée des médias pour exprimer la colère du secteur de la construction, accusé de manquer de civisme pendant la crise par certains membres du gouvernement. Il était en direct sur LCI aujourd’hui à 16h et sera également l’invité du 19/20 de France 3, du 20h de TF1 ainsi que celui de France2. Il était ce matin à 6h20, en direct sur France Info et à 6h30 sur RTL. Voici la lettre qu’il a adressé ce jour à Muriel Pénicaud, ministre du Travail.

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« Madame la Ministre,

Les propos que vous avez tenus ce matin, sur LCI, au sujet du supposé manque de « civisme » des entreprises de bâtiment sont scandaleux. Je vous l’écris avec gravité.

Aucune de nos entreprises, aucun de nos artisans, ne se sont mis dans une position de tire-au-flanc face à la situation actuelle ! C’est la mort dans l’âme que nombre d’entre eux ont dû cesser leur activité et mettre leurs salariés à l’arrêt : ils n’ignorent pas les conséquences désastreuses de cette décision pour leur structure mais ils font ce sacrifice en conscience et responsabilité.

Envisager que certains d’entre eux aient pu le faire pour profiter des éventuelles largesses de l’Etat en matière de chômage partiel est insultant. Le Bâtiment est une Profession qui a toujours su répondre présent pour soutenir l’emploi, l’apprentissage, l’insertion professionnelle et qui, encore récemment, a intégré parmi ses effectifs de nombreux migrants, naufragés du conflit syrien. Nous n’avons pas de leçon à recevoir : nous mesurons parfaitement le sens de l’épreuve. Le mépris affiché à notre égard depuis hier par les pouvoirs publics, dans le contexte que nous traversons, est d’une déloyauté sans nom. Il est aussi sans précédent.

Comment prétendre que les entreprises « ne joueraient pas le jeu » alors que dès le début de la crise sanitaire, nous avons multiplié les contacts avec le Ministère de l’Economie et les partenaires de la Profession, notamment les négociants, pour tenter de maintenir les circuits de production ? Comment prétendre que nous ferions preuve de « défaitisme », alors que jusqu’au bout nous avons été à l’initiative ?

Mais aujourd’hui : la fourniture de matériaux s’interrompt dans de nombreux endroits, les forces de l’ordre enjoignent à nos salariés de quitter les lieux, les clients refusent l’accès aux chantiers et - c’est le plus important au final - nos salariés sont légitimement inquiets pour leur santé. Impossible dans cette situation d’assurer un fonctionnement normal de nos activités. Nombre de nos entreprises ont d’ailleurs été réquisitionnées pour fournir leurs éléments de protection (masques et lunettes) aux hôpitaux de la région et elles l’ont fait avec évidence.

Les entreprises de Bâtiment ne désertent pas le front : elles n’ont pas d’autres choix que de fermer ! Personne ne pourrait comprendre que les milliers de salariés de Bâtiment n’aient pas le droit au chômage partiel par principe. Le chantage exercé par les DIRRECTE auprès de nos fédérations locales depuis plusieurs jours est inqualifiable. De qui se moque-t-on ?! Ce n’est pas en laissant entendre aujourd’hui que nos compagnons seraient des salariés de second ordre, que nous résoudrons la crise du recrutement une fois cet épisode passé.

Nous demandons à l’Etat de faire preuve de responsabilité comme nous le ferons, en tant qu’acteur économique, pour maintenir nos chantiers chaque fois que ce sera -réellement- possible et pour poursuivre les interventions d’urgence. Mais pour cela, comme nous le faisons depuis 48 heures maintenant, nous réitérons notre demande d’une réunion d’urgence avec les services de votre ministère, la médecine du travail et les syndicats pour définir ensemble les procédures de protection sanitaire de nos compagnons acceptées par tous. A ce stade, cette situation n’est pas réglée et pour nos entreprises, la confusion est totale. Plutôt que de jeter l’opprobre sur tout un secteur, en l’accusant dans les médias de désertion, efforçons-nous de trouver ensemble une ligne claire et cohérente. Et vite.

Dans l’attente -urgente- de votre réponse, je vous prie de croire, Madame la Ministre, à l’assurance de ma parfaite considération.

Jacques Chanut »

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